1. Startseite
  2. Briefe
  3. Nr. 729

Alexander von Humboldt an Wilhelm von Humboldt, 25.11.1802

A Lima, ce 25 novembre 1802.

Vous devez savoir mon arrivée à Quito par mes lettres précédentes, mon cher frère. Nous y arrivâmes, en traversant les neiges de Quiridin et de Tolima: car, comme la cordillère des Andes forme trois branches séparées, et que nous nous trouvions à Santa Fé de Bogota sur celle qui est la plus orientale, il nous fallut passer la plus élevée pour nous approcher des côtes de la mer du Sud. Il n’y a que les bœufs dont on puisse se servir à ce passage pour faire porter son bagage. Les voyageurs se font porter ordinairement par des hommes que l’on nomme largeros. Ils ont une chaise liée sur le dos, sur laquelle le voyageur est assis; ils font trois à quatre heures de chemin par jour, et ne gagnent que quatorze piastres en cinq à six semaines. Nous préférâmes d’aller à pied; et, le temps étant très-beau, nous ne passâmes que dix-sept jours dans ces solitudes, où l’on ne trouve aucune trace qu’elles aient jamais été habitées: on y dort dans des cabanes formées de feuilles d’héliconia que l’on porte tout exprès avec soi. A la descente occidentale des Andes, il y a des marais dans lesquels on enfonce jusqu’aux genoux. Le temps avoit changé; il pleuvoit à verse les derniers jours; nos bottes nous pourrirent aux jambes, et nous arrivâmes les pieds nus et couverts de meurtrissures à Carthago, mais enrichis d’une belle collection de nouvelles plantes, dont je rapporte un grand nombre de dessins.

De Carthago, nous allâmes à Popayan par Buga, en traversant la belle vallée de là rivière Cauca, et ayant toujours à nos côtés la montagne du Choca et les mines de platine qui s’y trouvent.

Nous restâmes le mois de novembre de l’année 1801 à Popayan, et nous y allâmes visiter les montagnes basaltiques de Julusuito, les bouches du volcan de Puracé, qui, avec un bruit effrayant, dégagent des vapeurs d’eau hydro-sulfureuse, et les granites porphyritiques de Pisché, qui forment des colonnes de cinq à sept pans, semblables à celles que je me souviens d’avoir vues dans les monts Enganéens de l’Italie, et qui sont décrites par Strange[a].

La plus grande difficulté nous resta à vainere pour venir de Popayan à Quito. Il fallut passer les Paramos de Pasto, et cela dans la saison des pluies, qui avoit commencé en attendant. On nomme Paramo dans les Andes tout endroit où, à la hauteur de dix-sept cents à deux mille toises[b], la végétation cesse, et où l’on sent un froid qui pénètre les os. Pour éviter les chaleurs de la vallée de Patia, où l’on prend dans une seule nuit des fièvres qui durent trois ou quatre mois, et qui sont connues sous le nom de calcuturas (fièvres) de Patia, nous passâmes au sommet de la Cordillère, par des précipices affreux, pour aller de Popayan à Almager, et de là à Pasto, situé au pied d’un volcan terrible.

L’entrée et la sortie de cette petite ville, où nous passâmes les fêtes de Noël, et où les habitans nous reçurent avec l’hospitalité la plus touchante, est tout ce qu’il y a de plus affreux au monde. Ce sont des forêts épaisses, situées entre des marais; les mules y enfoncent à mi-corps; et l’on passe par des ravins si profonds et si étroits, que l’on croit entrer dans les galeries d’une mine. Aussi les chemins sont-ils pavés des ossemens des mules qui y ont péri de froid et de fatigue. Toute la province de Pasto, y compris les environs de Guachucal et de Tuquères, est un plateau gelé, presque au-dessus du point où la végétation peut durer, et entouré de volcans et de soufrières qui dégagent continuellement des tourbillons de fumée. Les malheureux habitans de ces déserts n’ont d’autres alimens que les patatas; et si elles leur manquent, comme l’année derrière, ils vont dans les montagnes manger le tronc d’un petit arbre nommé achupalla (Pourretia pitcarnia): mais ce même arbre étant l’aliment des ours des Andes, ceux-ci leur disputent souvent la seule nourriture que leur présentent ces régions élevées. Au nord du volcan de Pasto, j’ai découvert dans le petit village indien de Voisaco, à treize cent soixante-dix toises au-dessus de la mer[c], un porphyre rouge, à base argileuse, enchâssant du feldspath vitreux, et de la cornéenne qui a toutes les propriétés de la serpentine du fichtel-gebirge. Ce porphyre a des pôles très-marqués, et ne montre aucune force attractive. Après avoir été mouillés jour et nuit pendant deux mois, et après avoir manqué de nous noyer près de la ville d’Ibarra par une crue d’eau très- subite, accompagnée de tremblemens de terre, nous arrivâmes le 6 janvier 1802 à Quito, où le marquis de Selvaalègre avoit eu la bonté de nous préparer une belle maison, qui, après tant de fatigues, nous offroit toutes les commodités que l’on pourroit désirer à Paris ou à Londres.

La ville de Quito est belle, mais le ciel y est triste et nébuleux; les montagnes voisines offrent peu de verdure et le froid y est très-considérable. Le grand tremblement de terre du 4 février 1797, qui bouleversa toute la province et tua dans un seul instant trente-cinq à quarante mille hommes, a aussi été funeste à cet égard aux habitans. Il a tellement changé la température de l’air, que le thermomètre y est ordinairement à 4–10° de Réaumur[d], et que rarement il monte à 16 ou 17°[e], tandis que Bouguer le voyoit constamment à 15 ou 16°[f]. Depuis cette catastrophe il y a des tremblemens de terre continuels; et quelles secousses! Il est probable que toute la partie haute de la province n’est qu’un seul volcan. Ce qu’on nomme les montagnes de Cotopoxi et de Pichincha ne sont que de petites cimes, dont les cratères forment des tuyaux différens, tous aboutissant au même creux. Le tremblement de terre de 1797 n’a malheureusement que trop prouvé cette hypothèse; car la terre s’est ouverte par-tout alors, et a vomi du soufre, de l’eau, etc. Malgré ces horreurs et ces dangers dont la nature les a environnés, les habitans de Quito sont gais, vifs et aimables. Leur ville ne respire que la volupté et le luxe, et nulle part peut-être il ne règne un goût plus décidé et plus général de se divertir. C’est ainsi que l’homme s’accoutume à s’endormir paisiblement sur le bord d’un précipice.

Nous avons fait un séjour de près de huit mois dans la province de Quito, depuis le commencement de janvier jusqu’au mois d’août. Nous avons employé ce temps à visiter chacun des volcans qui s’y trouvent; nous avons examiné, l’une après l’autre, les cimes du Pichincha, Cotopoxi, Antisana et Iliniça, en passant quinze jours à trois semaines auprès de chacune d’elles, et en revenant dans les intervalles toujours à la ville de Quito, dont nous sommes partis, le 9 juin 1802, pour nous rendre aux environs du Chimboraço qui est situé dans la partie méridionale de la province.

Je suis parvenu deux fois, le 26 et le 28 de mai 1802, au bord du cratère du Pichincha, montagne qui domine la ville de Quito. Jusqu’ici personne, que l’on sache, si ce n’est la Condamine, ne l’avoit jamais vu, et la Condamine luimême n’y étoit arrivé qu’après cinq ou six jours de recherches inutiles et sans instrumens, et n’y avoit pu rester que douze à quinze minutes à cause du froid excessif qu’il y faisoit. J’ai réussi à y porter mes instrumens; j’ai pris les mesures qu’il étoit intéressant de connoître, et j’ai recueilli de l’air pour en faire l’analyse. Je fis mon premier voyage seul avec un Indien. Comme la Condamine s’étoit approché du cratère par la partie basse de son bord, couverte de neige, c’est là qu’en suivant ses traces, je fis ma première tentative. Mais nous manquâmes périr. L’Indien tomba jusqu’à la poitrine dans une crevasse, et nous vîmes avec horreur que nous avions marché sur un pont de neige glacée; car à quelques pas de nous il y avoit des trous par lesquels le jour donnoit. Nous nous trouvions donc, sans le savoir, sur des voûtes qui tiennent au cratère même. Effrayé, mais non pas découragé, je changeai de projet. De l’enceinte du cratère sortent, en s’élançant pour ainsi dire sur l’abîme, trois pics, trois rochers qui ne sont pas couverts de neiges, parce que les vapeurs qu’exhale la bouche du volcan les y fondent sans cesse. Je montai sur un de ces rochers, et je trouvai à son sommet une pierre qui étant soutenue par un côté seulement et minée par dessous s’avançoit en forme de balcon sur le précipice. C’est là que je m’établis pour faire mes expériences. Mais cette pierre n’a qu’environ douze pieds de longueur, sur six de largeur, et est fortement agitée par des secousses fréquentes de tremblemens de terre, dont nous comptâmes dix-huit en moins de trente minutes. Pour mieux examiner le fond du cratère, nous nous couchâmes sur le ventre, et je ne crois pas que l’imagination puisse se figurer quelque chose de plus triste, de plus lugubre, et de plus effrayant que ce que nous vîmes alors. La bouche du volcan forme un trou circulaire de près d’une lieue de circonférence, dont les bords, taillés à pic, sont couverts de neige par en haut; l’intérieur est d’un noir foncé: mais le gouffre est si immense, que l’on distingue la cime de plusieurs montagnes qui y sont placées, Leur sommet sembloit être à trois cents toises au-dessous de nous; jugez donc où doit se trouver leur base. Je ne doute point que le fond du cratère ne soit de niveau avec la ville de Quito. La Condamine avoit trouvé ce cratère éteint et couvert même de neige; mais c’est une triste nouvelle que nous avons dû porter aux habitans de Quito, que le volcan qui leur est voisin, est embrasé actuellement. Des signes évidens nous en convainquirent cependant à n’en pouvoir pas douter. Les vapeurs de soufre nous suffoquoient presque lorsque nous nous approchions de la bouche; nous voyions même se promener çà et là des flammes bleuâtres; et de deux à trois minutes nous sentions de fortes secousses de tremblemens de terre dont les bords du cratère sont agités, et dont on ne s’aperçoit plus à cent toises de là. Je suppose que la grande catastrophe du 7 février 1797 a aussi rallumé les feux du Pichincha. Après avoir visité cette montagne seul, j’y retournai deux jours après, accompagné de mon ami Bonpland et de Charles de Montufar, fils du marquis de Selvaalegre. Nous étions munis de plus d’instrumens encore que la première fois, et nous mesurâmes le diamètre du cratère et la hauteur de la montagne. Nous trouvâmes à l’un 754 toises[1][h], et à l’autre 2477[i]. Dans l’intervalle de deux jours qu’il y eut entre nos deux courses au Pichincha, nous eûmes un tremblement de terre très-fort à Quito. Les Indiens l’attribuèrent à des poudres que je devois avoir jetées dans le volcan.

A notre voyage au volcan d’Antisana, le temps nous favorisa si bien, que nous montâmes jusqu’à la hauteur de 2773 toises[j]. Le baromètre baissa, dans cette région élevée, jusqu’à 14 pouces 7 lignes et le peu de densité de l’air nous fit jeter le sang par les lèvres, les gencives et les yeux même; nous sentions une foiblesse extrême, et un de ceux qui nous accompagnoient dans cette course, s’évanouit. Aussi avoit-on cru impossible jusqu’ici de s’élever plus haut que jusqu’à la cime nommée le Corazon, à laquelle la Condamine étoit parvenu, et qui est de 2470 toises[k]. L’analyse de l’air rapporté du point le plus élevé de notre course nous donna 0,008 d’acide carbonique sur 0,218 de gaz oxigène.

Nous visitâmes également le volcan de Gotopoxi, mais il nous fut impossible de parvenir à la bouche du cratère. Il est faux que cette montagne ait baissé à l’époque du tremblement de terre de 1797.

Le 9 juin 1802, nous partîmes de Quito pour nous rendre dans la partie méridionale de la province, où nous voulions examiner et mesurer le Chimboraço et le Tunguragua et lever le plan de tous les pays bouleversés par la grande catastrophe de 1797. Nous avons réussi à nous approcher jusqu’à environ 250 toises[l] près de la cime de l’immense colosse du Chimboraço. Une traînée de roches volcaniques, dépourvue de neiges, nous ficilita la montée; nous montâmes jusqu’à la hauteur de 3031 toises[m], et nous nous sentions incommodés de la même manière que sur le sommet de l’Antisana. Il nous restoit même encore deux ou trois jours après notre retour dans la plaine un malaise que nous ne pouvions attribuer qu’à l’effet de l’air dans ces régions élevées, dont l’analyse nous donna 20 centièmes d’oxigène. Les Indiens qui nous accompagnoient nous avoient déjà quittés avant d’arriver à cette hauteur, disant que nous avions intention de les tuer. Nous restâmes donc seuls, Bonpland, Charles Montufar, moi, et un de mes domestiques qui portoit une partie de mes instrumens; nous aurions poursuivi malgré cela notre chemin jusqu’à la cime, si une crevasse trop profonde pour la franchir ne nous en eût empêchés: aussi fìmesnous bien de descendre. Il tomba tant de neige à notre retour, que nous eûmes de la peine à nous reconnoître. Peu garantis contre le froid perçant de ces régions élevées, nous souffrions horriblement, et moi, en mon particulier, j’eus le désagrément d’avoir un pied ulcéré d’une chute que j’avois faite peu de jours auparavant; ce qui m’incommoda horriblement dans un chemin où à chaque instant on heurtoit contre une pierre aiguë, et où il falloit calculer chaque pas. La Condamine a trouvé la hauteur du Chimboraço de près de 3217 toises[n]. La mesure trigonométrique que j’en ai faite, à deux différentes reprises, m’a donné 3267[o], et j’ai lieu de mettre quelque confiance dans mes opérations. Tout cet énorme colosse (ainsi que toutes les hautes montagnes des Andes) n’est pas de granit, mais de porphyre, depuis le pied jusqu’à la cime, et le porphyre y a 1900 toises[p] d’épaisseur. Le peu de séjour, que nous fimes à l’énorme hauteur à laquelle nous nous étions élevés, fut des plus tristes et des plus lugubres; nous étions enveloppés d’une brume qui ne nous laissoit entrevoir de temps en temps que les abîmes affreux qui nous entouroient. Aucun être animé, pas même le condor, qui sur l’Antisana planoit continuellement sur nos tètes, ne vivifioit les airs. De petites mousses étoient les seuls êtres organisés qui nous rappeloient que nous tenions encore à la terre habitée.

Il est presque vraisemblable que le Chimboraço est comme le Pichincha et l’Antisana, de nature volcanique. La traînée sur laquelle nous y montâmes, est composée d’une roche brûlée et scorifiée, mêlée de pierre ponce; elle ressemble à tous les courans de laves de ce pays-ci, et continue au-delà du point où il fallut mettre un terme à mes recherches, vers la cime de la montagne. Il est possible que cette cime soit le cratère d’un volcan éteint, et cela est même probable; cependant l’idée de cette seule possibilité fait frémir avec raison: car, si ce volcan se rallumoit, ce colosse détruiroit toute la province.

La montagne de Tunguragua a baissé à l’époque du tremblement de terre de 1797. Bouguer lui donne 2620 toises[q]; je ne lui en ai trouvé que 2531[r]: elle a donc perdu près de 100 toises[s] de sa hauteur. Aussi les habitans des contrées voisines assurent-ils avoir vu s’écrouler son sommet devant leurs yeux.

Pendant notre séjour à Riobamba, où nous passâmes quelques semaines chez le frère de Charles Montufar, qui y est corrégidor, le hasard nous fit faire une découverte très-curieuse. On ignore absolument l’état de la province de Quito avant la conquête de l’Inca Tupayupangi[2]. Mais le roi des Indiens, Léandro Zapla[t], qui vit à Lican, et qui, pour un Indien, a l’esprit singulièrement cultivé, conserve des manuscrits, rédigés par un de ses ancêtres au seizième siècle, qui contiennent l’histoire de cette époque. Ces manuscrits sont écrits en langue Puruguay. Cette langue étoit autrefois la langue générale du Quito; mais dans la suite des temps elle a cédé à la langue de l’Inca ou Anichna, et elle est perdue maintenant. Heureusement qu’un autre des aïeuls de Zapla s’est amusé à traduire ces mémoires en espagnol. Nous y avons puisé de précieux renseignemens, sur-tout sur la mémorable époque de l’éruption de la montagne nommée Nevado del Attas, qui doit avoir été la plus haute mon- tagne de l’univers, plus élevée que le Chimboraço, et que les Indiens nommoient Capa-urcu, chef des montagnes. Ouainia Abomatha, le dernier cochocando (roi), indépendant du pays, régnoit alors à Lican. Les prêtres l’avertirent que celte catastrophe étoit le présage sinistre de sa perte. «La face de l’univers, lui dirent -ils, se change: d’autres dieux chasseront les nôtres. Ne résistons pas à ce que le destin ordonne». En effet, les Péruviens introduisirent le culte du Soleil dans le pays. L’éruption du volcan dura sept ans, et le manuscrit de Zapla prétend que la pluie de cendres à Lican étoit si abondante, que pendant sept ans il y fit une nuit perpétuelle. Quand on envisage la quantité de matières volcaniques qui se trouvent dans la plaine de Tapia, autour de l’énorme montagne écroulée alors, et que l’on pense que le Cotopoxi a souvent enveloppé Quito dans des ténèbres de quinze à dix-huit heures, on peut croire au moins que l’exagération n’est pas de beaucoup trop forte. Ce manuscrit, les traditions que j’ai recueillies à la Parime, et les hiéroglyphes que j’ai vus dans le désert du Casiquiare, où aujourd’hui il ne reste guère de vestiges d’hommes; tout cela joint aux notions données par Clavijero sur l’émigration des Mexicains vers le midi de l’Amérique, m’a fait naître des idées sur l’origine de ces peuples, que je me propose de développer dès que j’en aurai le loisir.

Je me suis beaucoup occupé aussi de l’étude des langues américaines, et j’ai vu combien ce que La Condamine dit de leur pauvreté est faux. La langue Caribe est à la fois riche, belle, énergique et polie; elle ne manque point d’expressions pour les idées abstraites; on y parle de postérité, d’éternité, d’existence, etc., et les signes numériques suffisent pour désigner toutes les combinaisons possibles des chiffres. Je m’applique sur-tout à la langue Inca; on la parle communément ici dans la société, et elle est si riche en tournures fines et variées, que les jeunes gens, pour dire des douceurs aux femmes, commencent à parler Inca, quand ils ont épuisé les ressources du Castillan. Ces deux langues, et quelques autres également riches, suffiroient seules pour prouver que l’Amérique a possédé autrefois une plus grande culture que celle que les Espagnols y trouvèrent en 1492. Mais j’en ai recueilli bien d’autres preuves encore, non seulement au Mexique et au Pérou, mais même à la cour du roi de Bogota (pays dont on ignore absolument l’histoire en Europe, et dont même la mythologie et les traditions fabuleuses sont très-intéressantes). Les prêtres savoient tirer une méridienne et observer le moment du solstice; ils réduisoient l’année lunaire à une année solaire par intercalations, et je possède moi-même une pierre heptagone, trouvée près de Santa-Fé, qui leur servoit pour calculer ces jours intercalaires. Mais ce qui plus est, même à l’Erevato, dans l’intérieur de la Parime, les sauvages croient que la lune est habitée par des hommes, et savent par les traditions de leurs ancêtres que sa lumière vient du soleil.

De Rio-Bamba, je dirigeai ma course par le fameux Paranio de l’Assuay vers Cuença; mais je visitai auparavant les grandes mines de soufre de Tirrau. C’est à cette montagne de soufre que les Indiens révoltés en 1797, après le tremblement de terre, voulurent mettre le feu. C’étoit sans doute le projet le plus désespéré qui eût été jamais conçu; car ils espéroient former par ce moyen un volcan qui engloutiroit toute la province d’Alaussy. Au haut du Paramo de l’Assuay, à une élévation de 2300 toises[u], sont les ruines du magnifique chemin de l’Inca. Il conduisoit presque jusqu’au Cuzco, étoit entièrement construit de pierres de taille, et très-bien alligné; il ressembloit aux plus beaux chemins romains. Dans les mêmes environs se trouvent aussi les ruines du palais de l’Inca Tupayupangi, dont La Condamine a donné la description dans les Mémoires de l’Académie de Berlin. Dans la carrière qui en a fourni les pierres, on en voit encore plusieurs à demi-travaillées. Je ne sais si La Condamine a aussi parlé du soi-disant billard de l’Inca. Les Indiens nomment cet endroit, en langue quichua, Inca-Chungana, le jeu de l’Inca; je doute cependant qu’il ait eu cette destination. C’est un canapé taillé dans le roc, avec des ornemens en forme d’arabesques, dans lesquels on croit que couroit la boule. Il n’y a rien de plus élégant dans nos jardins anglais, et tout y prouve le bon goût de l’Inca, car le siège est placé de manière à y jouir d’une vue délicieuse. Non loin de là, dans un bois, on trouve une tache ronde, de fer jaune, dans du grès. Les Péruviens l’ont ornée de figures, croyant que c’étoit l’image du Soleil. J’en ai pris le dessin.

Nous ne sommes restés que dix jours à Cuença; et de là nous nous sommes rendus à Lima par la province de Jaën, où, dans le voisinage de là rivière des Amazones, nous avons passé un mois. Nous sommes arrivés à Lima le 23 octobre 1802. 
 Je compte aller, d’ici au mois de décembre, à Acapulco, et de là au Mexique, pour me rendre, au mois de mai 1803, à la Havane. C’est là que sans perdre de temps je m’embarquerai pour l’Espagne. J’ai abandonné, comme vous voyez, l’idée de retourner par les Philippines. J’aurois fuit une immense traversée de mer sans voir autre chose que Manille et le Cap; ou si j’avois voulu faire une tournée aux Indes orientales, j’aurois manqué des facilités nécessaires pour ce voyage, qu’il étoit impossible de me procurer ici.

Nous avons eu quarante à cinquante jeunes crocodiles, sur la respiration desquels j’ai fait des expériences très-curieuses. Au lieu que d’autres animaux diminuent le volume de l’air dans lequel ils vivent, le crocodile l’augmente. Un crocodile mis dans mille parties d’air atmosphérique, qui en contiennent deux cent soixante-quatorze de gaz oxigène, quinze d’acide carbonique et sept cent onze d’azote, augmente en une heure quarante-trois minutes cette niasse de cent vingt-quatre parties; et ces onze cent vingt-quatre parties contiennent alors (comme je l’ai vu par une analyse exacte) 106,8 d’oxigène, 79 d’acide carbonique, et 938,2 de gaz azote, mêlé d’autres substances gazeuses inconnues. Le crocodile produit donc, en une heure trois quarts, 64 parties d’acide carbonique; il absorbe 167,2 d’oxigène: mais comme 46 parties se retrouvent dans 64 parties d’acide carbonique, il ne s’approprie que 121 parties d’oxigène; ce qui est très-peu, vu la couleur de son sang. Il produit 227 parties d’azote ou autres substances gazeuses, sur lesquelles les bases acidifiables n’exercent point d’action.[v]

J’ai fait ces expériences dans la ville de Munpox avec de l’eau de chaux et du gaz nitreux très-soigneusement prépare. Le crocodile est si sensible au gaz acide carbonique et à ses propres exhalaisons, qu’il meurt quand on le met dans de l’air corrompu par un de ses camarades. Cependant il peut vivre deux à trois heures sans respirer du tout. J’ai fait ces expériences avec des crocodiles de 7 à 8 pouces de long. Malgré cette petitesse, ils sont capables de couper le doigt (avec leurs dents), et ils ont le courage d’attaquer un chien. Ces expériences sont très-pénibles à faire et demandent beaucoup de circonspection. Nous portons des descriptions très-détaillées du caïman ou crocodile de l’Amérique méridionale; mais les descriptions de celui de l’Egypte que l’on avoit à mon départ d’Europe, n’étant pas également circonstanciées, je n’ose décider si c’est la même espèce. A présent, certainement l’Institut d’Egypte en aura fait qui lèveront tout doute à cet égard. Ce qu’il y a de certain, c’est qu’il y a trois différentes espèces de crocodiles sous les tropiques du nouveau continent, et que le peuple y distingue sous le nom de bava, caïman et crocodile. Aucun naturaliste n’a encore distingué suffisamment ces espèces, et cependant ces monstres sont les vrais poissons de ces climats tantôt (comme à la Nouvelle-Barcelone) d’un si bon naturel qu’on se baigne à leur vue, tantôt (comme à la Nouvelle-Guiane) si méchans et si cruels que, dans le temps que nous y fûmes, ils dévorèrent un Indien au milieu de la rue, au quai. A Oratuen, nous avons vu une fille indienne de dix-huit ans, qu’un crocodile tenoit par le bras; elle eut le courage de chercher de l’autre main son couteau dans sa poche, et d’en donner tant de coups dans les yeux du monstre, qu’il la lâcha en lui coupant le bras près de l’épaule. La présence d’esprit de cette fille fut tout aussi étonnante que l’adresse des Indiens pour guérir heureusement une plaie aussi dangereuse: on eût dit que le bras avoit été amputé et traité à Paris.

Près de Santa-Fé se trouvent dans le Campo de Gigante, à 1370 toises[w] de hauteur, une immensité d’os fossiles d’élephans, tant de l’espèce d’Afrique, que des carnivores qu’on a découverts à l’Ohio. Nous y avons fait creuser, et nous en avons envoyé des exemplaires à l’Institut national. Je doute qu’on ait trouvé jusqu’ici ces os à une si grande hauteur: depuis, j’en ai reçu deux d’un endroit des Andes situé vers le 2° de latitude du Quito et du Chili, de manière que je puis prouver l’existence et la destruction de ces éléphants gigantesques depuis l’Ohio jusques aux Patagons. Je rapporte une belle collection de ces os fossiles pour M. Cuvier. On a découvert il y a quinze ans, dans la vallée de la Madeleine, un squelette entier de crocodile pétrifié dans une roche calcaire; l’ignorance l’a fait briser, et il m’a été impossible de m’en procurer la tête, qui existoit encore il y a peu de temps.



|Text der deutschen Übersetzung (Familie von Humboldt 1880, S. 40–54)|
Lima, d. 25. November 1802.

Aus meinen vorigen Briefen, lieber Bruder, musst Du meine Ankunft in Quito wissen. Unser Weg dahin ging (im September 1801) durch die Schneegegenden von Quiridiu und Tolima. Denn die Cordillere der Anden bildet drei abgesonderte Arme; und da wir zu Sta. Fé de Bogota uns auf dem östlichsten derselben befanden, so mussten wir nun den höchsten dieser Gebirgsarme übersteigen, um an die Küsten des Südmeeres zu gelangen. Blos Ochsen lassen sich auf diesem Wege gebrauchen, um das Gepäcke fortzuschaffen. Die Reisenden selbst pflegen durch Männer getragen zu werden, welche Cargueros heissen. Sie haben auf ihren Rücken einen Stuhl gebunden, worauf der Reisende sitzt; machen 3 bis 4 Stunden Wegs den Tag über und verdienen in 5 bis 6 Wochen nur 14 Piaster. Wir zogen die Fusswanderung vor und da das Wetter ungemein schön war, so brachten wir nur 17 Tage in diesen Einöden zu, woselbst keine Spur sich findet, dass sie je bewohnt gewesen wären, und wo man in Hütten von Heliconia-Blättern schläft, die man zu dem Ende mit sich nimmt. Am westlichen Abhange der Anden gibt es Sümpfe, worein man bis an die Knie sinkt. Das Wetter hatte sich geändert, es regnete stromweise in den letzten Tagen, unsere Stiefeln faulten uns am Leibe, und wir kamen mit nackten und blutrünstigen Füssen zu Cartago an, aber mit einer schönen Sammlung neuer Pflanzen bereichert, wovon ich eine Menge Zeichnungen mitbringe.

Von Cartago gingen wir nach Popayan, über Buga durch das herrliche Thal des Caucaflusses, wobei wir das Chocagebirge mit seinen Platinagruben immer zur rechten Seite hatten.

Den November 1801 blieben wir zu Popayan und besuchten von dort die Basaltgebirge von Julusuito; den Schlund des Vulkans von Purace, der mit entsetzlichem Getöse Dämpfe eines durch geschwefeltes Wasserstoffgas geschwängerten Wassers ausstösst; und die porphyrartigen Granite von Pisché, welche fünf- bis siebeneckige Säulen bilden, denjenigen gleich, die ich mich in den Euganeen in Italien gesehen zu haben erinnere, und die Strange[x] beschrieben hat. Die grösste Schwierigkeit stand uns noch zu überwinden bevor, zwischen Popayan und Quito. Auf diesem Wege mussten wir die Paramos von Pasto übersteigen, und zwar in der Regenzeit, die bereits angefangen hatte. Paramo heisst in den Anden jeder Ort, wo auf einer Höhe von 1700 bis 2000 Toisen die Vegetation still steht, und eine Kälte ist, die bis in die Knochen dringt. Um die Hitze des Patiathales zu vermeiden, wo man in Einer Nacht Fieber bekommt, die drei bis vier Monate dauern und die unter den Namen calenturas de Patia bekannt sind, gingen wir über die Spitze der Cordillere, wo scheusslich schroffe Abgründe sind, kamen so von Popayan nach Almager und von da nach Pasto, das am Fusse eines furchtbaren Vulkans liegt.

Man kann sich nichts Schrecklicheres denken, als den Eintritts- und den Eingangsweg bei dieser kleinen Stadt, wo wir die Weihnachten zubrachten, und deren Einwohner uns mit rührender Gastfreundlichkeit aufnahmen. Dicke Wälder liegen zwischen Morästen; die Maulthiere sinken bis auf den halben Leib ein; und man muss durch so tiefe und enge Schlüfte, dass man in Stollen eines Bergwerks zu kommen glaubt. Auch sind die Wege mit den Knochen der Maulthiere gepflastert, die hier vor Kälte oder aus Mattigkeit umfielen. Die ganze Provinz Pasto mit Inbegriff der Gegenden um Guachucal und um Tuqueres, ist eine gefrorne Gebirgsfläche, fast über den Punkt herauf wo die Vegetation aushalten kann, und mit Vulkanen und Solfataren umringt, woraus beständige Rauchwirbel dampfen. Die unglücklichen Bewohner dieser Wüsteneien haben keine andere Nahrung als Pataten; und wenn diese ihnen fehlen, wie im letztverwichenen Jahr, so gehn sie ins Gebirge, um den Stamm eines kleinen Baumes zu essen, der Achupalla heisst (Pourretia Pitcarnia). Da aber der nemliche Baum auch den Bären der Andes zur Speise dient, so machen diese ihnen oft die einzige Nahrung streitig, welche dies hohe Land den Menschen darbeut. Zur Nordseite des Vulkans von Pasto habe ich in dem kleinen indianischen Dorf Voisako, 1370 Toisen über der Meeresfläche, einen rothen Thon und einen Hornstein-Porphyr mit eingemengtem glasigen Feldspath entdeckt, welcher alle Eigenschaften des Serpentins vom Fichtelgebirge besitzt. Dieser Porphyr zeigt sehr deutliche Pole, aber durchaus keine Anziehung. Nachdem wir zwei Monate hindurch Tag und Nacht von Regengüssen durchnässt waren und bei der Stadt Ibarra beinahe ertranken, da plötzlich bei einem Erdbeben das Wasser stieg; langten wir am 6. Jänner 1802 zu Quito an, wo der Marques von Selvalegre die Güte gehabt hatte, uns ein vortreffliches Haus einzurichten, das nach so vielen Beschwerden uns alle Gemächlichkeiten darbot, die man nur in Paris oder London verlangen könnte.

Die Stadt Quito ist schön, aber der Himmel traurig und neblicht; die benachbarten Berge zeigen kein Grün, und die Kälte ist beträchtlich. Das grosse Erdbeben vom 4. Februar 1797, welches die ganze Provinz umwarf und in Einem Augenblick 35 bis 40000 Menschen tödtete, ist auch in jener Rücksicht den Bewohnern höchst schädlich gewesen. Es hat die Temperatur der Luft so sehr geändert, dass der Thermometer gewöhnlich zwischen 4 und 10 Grad Réaumur steht, und selten auf 16 oder 17 steigt, da Bouguer ihn beständig auf 15 oder 16 sah. Seit jener Katastrophe hören die Erdbeben nicht auf; und welche Stösse mitunter! Wahrscheinlich ist der ganze hohe Theil der Provinz ein einziger Vulkan. Was man die Berge von Kotopaxi und Pichincha nennt, sind nur kleine Spitzen, deren Krater verschiedene Röhren bilden, die sämmtlich zu dem nämlichen Heerd hinabführen. Diese Hypothese ist leider nur zu sehr durch das Erdbeben von 1797 erwiesen. Denn die Erde hat sich allenthalben damals von einander gethan, und Schwefel, Wasser u. s. w. ausgeworfen. Ungeachtet dieser Schrecknisse und Gefahren, womit die Natur sie rings her umgibt, sind die Einwohner von Quito froh, lebendig und liebenswürdig. Ihre Stadt athmet nur Wollust und Ueppigkeit und nirgend vielleicht gibt es einen entschiedenern und allgemeinern Hang sich zu vergnügen. So kann sich der Mensch gewöhnen, ruhig am Rande eines jähen Abgrundes zu schlafen.

Wir haben uns fast acht Monate in der Provinz Quito aufgehalten, von Anfang des Jänners bis in den August. Diese Zeit ward angewandt, jeden der dortigen Vulkane zu besteigen. Wir untersuchten nacheinander die Spitzen des Pichincha, Cotopaxi, Antisana und Iliniça; brachten 14 Tage bis 3 Wochen bei jeder zu, kehrten in der Zwischenzeit immer nach der Hauptstadt zurück und brachen am 9. Juni 1802 von da auf, um nach dem Chimboraço zu reisen, der im südlichen Theile dieser Provinz liegt.

Zweimal, den 26. und den 28. Mai 1802, bin ich bei dem Krater des Pichincha gewesen, des Berges, welcher neben der Stadt Quito emporragt. Niemand, so viel man weiss, hatte ihn bisher je gesehen, ausser Condamine; und dieser selbst kam nur hin, nachdem er 5 bis 6 Tage in unnützem Suchen verloren hatte, kam ohne Instrumente hin, und konnte wegen der übermässigen Kälte nur 12 bis 15 Minuten dort oben aushalten. Es glückte mir, meine Instrumente hinzubringen, ich traf die nöthigen Vorkehrungen, um das Wichtigste dort zu untersuchen und habe Luft dort gefangen, die ich analysirte. Meine erste Reise machte ich allein mit einem Indianer. Da Condamine sich dem Krater von der niedern mit Schnee bedeckten Seite des Randes genähert hatte, so trat ich bei meinem ersten Versuch in seine Fussstapfen. Aber bald wären wir verunglückt. Der Indianer sank bis an die Brust in eine Spalte und wir sahen mit Grausen, dass wir über eine Brücke von eisigem Schnee gegangen waren. Denn wenig Schritte von uns gab es Löcher, wodurch das Tageslicht schien. So befanden wir uns, ohne es zu wissen, auf Gewölben, die mit dem Krater selbst zusammen hingen. Erschreckt, aber nicht muthlos, fasste ich einen andern Entschluss. Aus dem Umkreise des Kraters springen, gleichsam über den Abgrund hinstrebend drei Felsspitzen hervor, die nicht mit Schnee bedeckt sind, weil die Dämpfe aus dem Schlunde des Vulkans ihn unaufhörlich schmelzen. Auf einen dieser Piks stieg ich, und fand auf dessen Gipfel einen Stein, der nur von einer Seite auflag und unten minirt war, so dass er einen Balkon über den Abgrund bildete. Hier schlug ich meinen Sitz auf, um unsere Versuche anzustellen. Aber dieser Stein ist nur ungefähr 12 Fuss lang und 6 Fuss breit, und wird von den häufigen Erdstössen mächtig erschüttert, deren wir 18 in nicht vollen 30 Minuten zählten. Um den Boden des Kraters besser zu beobachten, legten wir uns auf den Bauch; und ich glaube nicht, dass die Fantasie sich etwas Finstereres, Trauer- und Todmässigeres vorstellen kann, als wir hier sahen. Der Schlund des Vulkans bildet ein kreisformiges Loch, ungefähr von 1 Französ. Meile im Umfang; die Ränder desselben, in Pikgestalt ausgehauen, sind oberwärts mit Schnee bedeckt; das Innere ist dunkelschwarz. Aber die Tiefe ist so ungeheuer, dass mehrere Berge darin stehen, deren Gipfel man unterscheidet. Ihre Spitzen schienen 300 Toisen unter uns; wo also mag ihr Fuss stehen? Ich zweifle nicht, dass der Boden des Kraters mit der Stadt Quito horizontal liegt. La Condamine fand diesen Krater erloschen und sogar mit Schnee überdeckt; wir aber haben den Einwohnern von Quito die traurige Nachricht bringen müssen, dass es in ihrem nachbarlichen Vulkan jetzt brennt. Deutliche Zeichen gestatteten keinen Zweifel hieran. Schwefeldämpfe erstickten uns beinahe, wenn wir uns dem Schlunde näherten; wir sahen selbst bläuliche Flammen hin und her hüpfen und fühlten alle 2 oder 3 Minuten heftige Stösse von Erdbeben, welche die Ränder des Kraters erschüttern, aber 100 Toisen entfernt nicht mehr zu spüren sind. Vermuthlich hat die grosse Katastrophe vom Februar 1797 auch das Feuer des Pichincha wieder angezündet. – Zwei Tage nach diesem Besuch bestieg ich den Berg noch einmal, in Begleitung meines Freundes Bonpland und Karls von Montufar, eines Sohnes des Marques Selvalegre. Wir führten noch mehr Instrumente bei uns, als das erste Mal, und massen den Umfang des Kraters und die Höhe des Berges. Den ersten fanden wir von 754, die andere von 2477 Toisen. Während der zwei Tage zwischen unsern zwei Besuchen des Pichincha, hatten wir ein sehr starkes Erdbeben zu Quito. Die Indianer schrieben es den Pulvern zu, die ich in den Vulkan geworfen haben sollte.

Bei unsrer Reise zum Vulkan von Antisana begünstigte uns die Witterung so, dass wir bis zu 2773 Toisen hinaufstiegen. Der Barometer sank in dieser hohen Gegend auf 14 Zoll 11 Linien und die geringe Dichtigkeit der Luft trieb uns das Blut aus den Lippen, dem Zahnfleisch und selbst den Augen. Wir fühlten uns äusserst matt, und einer unsrer Begleiter fiel in Ohnmacht. Auch hatte man es für unmöglich gehalten, weiter als an die Spitze, el coraçon genannt, zu kommen, welche Condamine erstieg, und die 2470 Toisen hoch liegt. Die Analyse der von unserm höchsten Standpunkt zurückgebrachten Luft gab 0,008 Kohlensäure auf 0,218 Sauerstoffgas.

Den Vulkan von Cotopaxi besuchten wir gleichfalls, aber es war uns unmöglich, an den Schlund des Kraters zu gelangen. Es ist falsch, dass dieser Berg durch das Erdbeben vom J. 1797 niedriger geworden sei.

Am 9. Juni traten wir die Reise zum Untersuchen und Messen des Chimborazo und des Tunguragua an, und zum Aufnehmen aller durch die grosse erwähnte Katastrophe zerrütteten Länder. Es gelang, bis auf 250 Toisen nah uns dem Gipfel des ungeheuren Kolosses Chimborazo zu nähern. Ein Zug vulkanischer, schneeloser Berge erleichterte uns das Steigen. Wir kamen auf 3031 Toisen und fühlten die nemliche Beschwerde wie auf der Spitze des Antisana. Selbst noch ein paar Tage nach unsrer Rückkehr in die Ebene blieb uns ein Uebelbefinden, das wir nur der Wirkung der Luft (in jener Höhe) zuschreiben konnten, deren Analyse uns 20 Hunderttheile Sauerstoff gab. Die uns begleitenden Indianer hatten uns schon früher verlassen, und sagten, dass wir sie tödten wollten. Wir blieben also allein, Bonpland, Karl Montufar, ich, und einer meiner Bedienten, der einen Theil meiner Instrumente trug. Dennoch hätten wir unsern Weg bis zu dem Gipfel fortgesetzt, wenn nicht ein zu grosser Spalt im Boden uns gehindert hätte. Auch thaten wir sehr wohl, umzukehren. Auf unserm Rückwege fiel ein so starker Schnee, dass wir uns kaum sehen konnten. Wir hatten uns gegen die schneidende Kälte dieser hohen Gegend nur wenig geschützt und litten daher unsäglich, vornehmlich ich, der ich noch einen wunden Fuss von einem Fall vor wenig Tagen hatte, welches mir die grössten Schmerzen verursachte, da man auf diesem Wege alle Augenblick an einen spitzen Stein stiess und nicht vorsichtig genug gehen konnte. La Condamine hat den Chimborazo an 3217 Toisen hoch gefunden. Meine, zweimal angestellte, trigonometrische Messung gab mir 3267; und ich darf meinen Operationen etwas trauen. Dieser ganze erstaunenswürdige Riesenberg besteht, wie alle hohen Berge der Anden, nicht aus Granit, sondern vom Fuss bis zum Gipfel aus Porphyr, und der Porphyr hat 1900 Toisen Dicke. Der kurze Aufenthalt in dieser ungeheuren Höhe, wozu wir uns hinaufgeschwungen hatten, zeigte die traurigsten Schreckbilder. Ein Winternebel umhüllte uns, woraus nur von Zeit zu Zeit die grauenvollsten Abgründe in unserer Nähe hervorschimmerten. Kein beseeltes Wesen, nicht einmal der Condor, der auf dem Antisana stets über unsern Häuptern schwebte, gab der Luft ein Leben. Kleine Moose waren die einzigen organischen Gestalten, die uns erinnerten, dass wir noch der bewohnten Erde angehörten.

Fast mit Wahrscheinlichkeit lässt sich annehmen, dass der Chimborazo, wie der Pichincha und der Antisana vulkanischer Natur ist. Die Bergreihe, auf welcher wir zu ihm hinaufstiegen, besteht aus einem verbrannten und verschlackten Felsen, mit Bimstein gemischt; sie gleicht allen Lavaströmen dieses Landes, und geht noch über den Punkt, wo wir innezuhalten genöthigt wurden, hinauf zur Spitze des Berges. Es ist möglich, es ist selbst wahrscheinlich, dass diese Spitze der Krater eines erloschenen Vulkans sei. Aber der Gedanke blos dieser Möglichkeit erregt ein gerechtes Schaudern. Denn, wenn dieser Vulkan sich wieder entzündete, so müsste ein solcher Koloss die ganze Provinz vernichten.

Der Berg Tunguragua hat seit dem Erdbeben 1797 an Höhe verloren. Bouguer gibt ihm 2650 Toisen, ich fand nur 2530. Folglich hat er über 100 T. eingebüsst. Auch versichern die Einwohner, vor ihren Augen seine Spitze durch die Erschütterung niederstürzen gesehen zu haben.

* * *

Zu Riobamba (südwärts von Quito, auf dem Wege nach Lima) brachten wir einige Wochen zu, bei einem Bruder Karls von Montufar unseres Reisegefährten, welcher daselbst Corregidor ist. Hier verschaffte uns das Ungefähr eine höchst merkwürdige Entdeckung. Der Zustand der Provinz Quito, ehe der Inka Tupayupangi sie eroberte, ist noch durchaus unbekannt. Aber der indianische König, Leandro Zapla[y], welcher zu Likan wohnt und für einen Indianer ungemein gebildet ist, besitzt Handschriften von einem seiner Vorfahren aus dem 16. Jahrhundert verfasst, welche die Geschichte jener Begebenheiten enthalten. Sie sind in der Puruguay-Sprache geschrieben. Dies war ehedem die allgemeine Sprache in Quito, die nachher der Inka- oder Quichua-Sprache gewichen und jetzt völlig untergegangen ist. Glücklicherweise fand ein anderer Ahnherr Zapla’s Vergnügen daran, diese Memoiren in’s Spanische zu übersetzen. Wir haben aus ihnen schätzbare Nachrichten geschöpft: vornehmlich über die merkwürdige Epoche der Erupzion des sogenannten Nevado del Altar, welches der grösste Berg der Welt gewesen sein muss, höher als der Chimborazo und der bei den Indianern Kapaurku (Haupt der Berge) hiess. Zu der Zeit regierte Uainia Abomatha, der letzte unabhängige Kochokando des Landes, zu Likan. Die Priester offenbarten ihm die unglückschwangere Bedeutung dieser Katastrophe. "Der Erdball, sagten sie, verändert seine Gestalt; andere Götter werden kommen und die unsrigen vertreiben. Lass uns dem Geheiss des Schicksals nicht widerstreben." Wirklich führten die Peruaner den Sonnendienst (statt der alten Religion) ein. Der Ausbruch des Vulkans dauerte 7 Jahre, und die Handschrift Zapla’s lässt die Asche zu Likan so dicht und häufig regnen, dass eine siebenjährige stete Nacht dort gewesen sei. Wenn man in der Ebene von Tapia die Menge der vulkanischen Materie, um den ungeheuren damals eingestürzten Berg (itzt steht er, wie zerrissen mit zwei noch immer mächtig hohen Spitzen da) betrachtet; wenn man bedenkt, dass der Cotopoxi mehrmal Quito in 15–18stündige Finsterniss eingehüllt hat, so muss man einräumen, dass die Uebertreibung wenigstens nicht gar zu unmässig war.

Dieses Manuscript, und die Sagen die ich in Parima sammelte, und die Hieroglyphen, die ich in der Wüste des Casiquiari sah, wo gegenwärtig keine Spur von Menschen zu finden ist: Alles dies, nebst Clavigero’s Nachrichten über die Wanderungen der Mexikaner in das südliche Amerika hat mich auf Ideen über den Ursprung dieser Völker geleitet, die ich zu entwickeln gedenke, sobald mir Musse dazu wird.

Das Studium der amerikanischen Sprachen hat mich ebenfalls sehr beschäftigt, und ich habe gefunden, wie falsch La Condamine’s Urtheil über ihre Armuth ist. Die Caribische Sprache z. B. verbindet Reichthum, Anmuth, Kraft und Zartheit. Es fehlt ihr nicht an Ausdrücken für abstrakte Begriffe: sie kann von Zukunft, Ewigkeit, Existenz u. s. w. reden; und hat Zahlwörter genug, um alle mögliche Combinationen unsrer Zahlzeichen anzugeben. Vorzüglich lege ich mich auf die Inka-Sprache; sie ist die gewöhnliche hier (zu Quito, Lima u. s. w.) in der Gesellschaft, und ist so reich an feinen und manichfachen Wendungen, dass die jungen Herren, um den Damen Süssigkeiten vorzusagen, gemeiniglich Inka zu sprechen anfangen, wenn sie den ganzen Schatz des Kastilischen erschöpft haben.

Diese zwei Sprachen, und einige andere gleich reiche, könnten allein genügen, sich zu überzeugen, dass Amerika einst eine weit höhere Kultur besass, als die Spanier 1492 dort fanden. Aber ich habe dafür noch ganz andere Beweise. Nicht blos in Mexico und Peru, sondern auch am Hofe des Königs von Bogota (ein Land, dessen Geschichte man in Europa gar nicht kennt, und dessen Mythologie und fabelhafte Sagen selbst schon höchst interessant sind), verstanden die Priester eine Mittagslinie zu ziehen, und den Augenblick des Solstitiums zu beobachten; sie verwandelten das Mondjahr in ein Sonnenjahr, durch Einschaltungen: und ich besitze einen siebeneckigen Stein, der zu Sta. Fé gefunden ist und der ihnen zur Berechnung dieser Schalttage diente. Noch mehr! zu Erivaro im Innern der Landschaft Parima glauben die Wilden, dass der Mond bewohnt ist, und wissen durch Tradition von ihren Vätern, dass er sein Licht von der Sonne hat.

Von Riobamba ging mein Weg über den berühmten Paramo des Assuay nach Cuença. Doch besuchte ich vorher das grosse Schwefelwerk zu Tiskan. Diesen Schwefelberg wollten die rebellirenden Indianer, nach dem Erdbeben von 1797, in Brand stecken. Gewiss der schrecklichste Plan, den je die Verzweiflung eingab! denn sie hofften auf die Art einen Vulkan hervorzubringen, der die ganze Provinz Alaussi vernichtet hätte.

Auf dem Paramo von Assuay, in einer Höhe von 2300 Toisen, sind die Ruinen des prächtigen Inka-Weges. Diese Strasse läuft fast bis nach Kusko, ist ganz aus behauenen Steinen aufgeführt und schnurgerade: sie gleicht den schönsten Wegen der alten Römer. In derselben Gegend liegen auch die Ruinen des Palastes des Inka Tupayupangi, welche La Condamine in den Memoiren der Berliner Akademie beschrieben hat. Man sieht annoch in dem Felsbruch, welcher die Steine dazu geliefert hat, mehrere halbbearbeitete. Ich weiss nicht, ob Condamine auch von dem sogenannten Billard des Inka spricht. Die Indianer nennen den Platz in der Quichuasprache Inka-chungana (des Inka Spiel); allein ich zweifle, dass er diese Bestimmung hatte. Es ist ein Kanapé, in den Felsen gehauen, mit Arabesken-ähnlichen Zieraten, worin, wie man glaubt, die Kugel lief. Unsere englischen Gärten haben nichts Eleganteres aufzuweisen. Der richtige Geschmack des Inka leuchtet überall hervor; der Sitz ist so gestellt, dass man eine entzückende Aussicht geniesst. Nicht weit von da, in einem Gehölz findet man einen runden Fleck gelben Eisens in Sandstein. Die Peruaner haben die Platte mit Figuren geziert: denn sie glaubten, dass sie die Sonne abbilde. Ich habe eine Zeichnung davon genommen. Wir blieben nur 10 Tage zu Cuença und begaben uns von da nach Lima, durch die Provinz Jaen, wo wir in der Nähe des Amazonenflusses einen Monat zubrachten. In Lima kamen wir den 23. October 1802 an.

Ich gedenke von hier im Dezember nach Acapulco, und von da nach Mexico zu gehen, um im Mai 1803 in Havana zu sein. Da werde ich mich ohne Verweilen nach Spanien einschiffen. – Ich habe, wie Du siehst, den Gedanken aufgegeben, über die Philippinen zurückzukehren. Ich hätte eine ungeheuere Seereise gemacht, ohne etwas anderes zu sehen, als Manilla und das Cap; oder hätte ich Ostindien besuchen wollen, so würde es mir an dem, was ich zu dieser Reise brauchte, gefehlt haben, da ich es mir hier nicht verschaffen kann.

Anmerkungen

  1. 1 |AvH| Le cratère du Vésuve n’a que 312 toises[g] de diamètre.
  2. 2 |AvH| La conquête du Quito par les Péruviens se fit en 1470.

  1. a |Editor| Von John Strange erschien 1778 in Mailand: De’ monti colonnari e d’altri fenomeni vulcanici dello Stato Veneto Memoria, bereits 1780 in deutscher Übersetzung in Heidelberg bei Pfähler: Johann Strange, Baronet und Residenten Sr. Großbrittan. Majestät, bey der erlauchten Rep. Venedig […] Abhandlung von den säulenartigen Gebürgen und andern vulkanischen Naturerscheinungen im venetianischen Gebiete: in einem Schreiben an Herrn Baronet Pringle, etc.; mit Kupfern. [FZ]
  2. b |Editor| Die Toise ist ein altes französisches Längenmaß, entsprechend dem deutschen Klafter. Die im 18. Jahrhundert übliche Toise du Châtelet hatte eine Länge von 1,949 m; siehe dazu den ausführlichen Artikel in der französischen Wikipedia. Die Höhenangabe von 1700 bis 2000 Toisen entspricht 3313,30 bis 3898 m. [FZ]
  3. c |Editor| D.h. 2670,13 m.
  4. d |Editor| D.h. 5–12,5 °C.
  5. e |Editor| D.h. 20 oder 21,25 °C.
  6. f |Editor| D.h. 18,75 oder 20 °C.
  7. g |Editor| D.h. 608 m.
  8. h |Editor| D.h. 1469,55 m.
  9. i |Editor| D.h. 4827,67 m.
  10. j |Editor| D.h. 5404,58 m.
  11. k |Editor| D.h. 4814,03 m.
  12. l |Editor| D.h. 487,25 m.
  13. m |Editor| D.h. 5907,42 m.
  14. n |Editor| D.h. 6269,93 m.
  15. o |Editor| D.h. 6367,38 m.
  16. p |Editor| D.h. 3703,10 m.
  17. q |Editor| D.h. 5106,38 m.
  18. r |Editor| D.h. 4932,92 m.
  19. s |Editor| 194,90 m.
  20. t |Editor| Gemeint ist hier Leandro Sepla y Oro. [FZ]
  21. u |Editor| D.h. 4482,70 m.
  22. v |Editor| Die folgenden Ausführungen zu den Krokodilen fehlen in der deutschen Übersetzung von 1880 (s.u.). [FZ]
  23. w |Editor| D.h. 2670,13 m.
  24. x |Editor| Von John Strange erschien 1778 in Mailand: De’ monti colonnari e d’altri fenomeni vulcanici dello Stato Veneto Memoria, bereits 1780 in deutscher Übersetzung in Heidelberg bei Pfähler: Johann Strange, Baronet und Residenten Sr. Großbrittan. Majestät, bey der erlauchten Rep. Venedig … Abhandlung von den säulenartigen Gebürgen und andern vulkanischen Naturerscheinungen im venetianischen Gebiete: in einem Schreiben an Herrn Baronet Pringle, etc.; mit Kupfern.
  25. y |Editor| Gemeint ist hier Leandro Sepla y Oro.
Zitierhinweis

Alexander von Humboldt an Wilhelm von Humboldt, 25.11.1802. In: Wilhelm von Humboldt: Online-Edition der Sprachwissenschaftlichen Korrespondenz. Berlin. Version vom 15.03.2023. URL: https://wvh-briefe.bbaw.de/729

Download

Dieses Dokument als TEI-XML herunterladen

Versionsgeschichte

Frühere Version des Dokuments in der archivierten Webansicht ansehen